Entendre un petit élève utiliser un mot compliqué qu’il vient d’apprendre en classe, ou faire une phrase complexe qu’il était incapable de faire il y a quelques mois… Ce sont des petits bonheurs quotidiens dans une classe de maternelle. Des enfants qui arrivent à l’école avec des phrases toute simples, ou en disant que quelques mots isolés, partent au CP en parlant “comme des adultes”. Mais pas tous.
L’écart de niveau de langage entre élèves dans une classe peut être frappant. Et il n’est pas toujours facile de savoir que faire pour aider nos petits élèves qui ont un plus de difficultés.
Le Conseil Scientifique de l’Education Nationale a publié une synthèse de la recherche et des recommandations pour faciliter l’acquisition du vocabulaire à l’école maternelle.
Cette série d’articles propose des outils et activités pour la maternelle, qui répondent aux principes et recommandations de ce rapport.
On commence par des activités qui vont sensibiliser l’élève à la structure phonétique de la langue française. Il ne s’agit pas tant de leur enseigner du vocabulaire, mais de jeter les bases pour une acquisition fluide des mots. Avant de pouvoir apprendre et utiliser un mot, il est essentiel de le reconnaître et de le distinguer correctement des autres mots similaires.
Qu’est-ce que la structure phonétique
Quand on parle de phonologie en maternelle, on pense aux sons qui composent les mots. La structure phonétique englobe cela, l’ensemble des sons, mais aussi les règles de prononciation (par exemple les liaisons), et des caractéristiques acoustiques de la langue. Pour la langue française, certains caractéristiques sont particulièrement utiles à connaître car elles vont guider les activités proposées à nos élèves:
- Les sons qui composent la langue: la langue française est composée de 12 sons voyelles, 3 semi-voyelles et 17 consonnes, qui se combinent dans des syllabes avec des structures caractéristiques de la langue, puis en mots (plus de détails ici). Dès la première année de vie, l’enfant distingue ces sons et ces structures, même s’il n’arrive pas encore à les prononcer. Il est donc important de leur parler en utilisant une bonne articulation. Cela implique également qu’il est nécessaire d’accompagner les enfants qui ont eu peu d’exposition à la langue française avant leur entrée à l’école maternelle dans ce processus d’acquisition.
- La tonalité du français est modérée, cela veut dire qu’on distingue peu les mots à l’intérieur d’une phrase. Cela donne des échanges mignons comme avec cet enfant de 3 ans à qui je dis “ce sont des groseilles”, et qui me répond “on dirait des petites zeilles”. Quand on lit une histoire avec des mots nouveaux, il est important de bien articuler, séparer ces mots, les répéter si besoin.
- Les liaisons posent une difficulté supplémentaire, ce qui donne des “nananas” et “navions”. Pour aide l’enfant à connaître le bon mot, on peut attirer leur attention au mot isolé. “C’est un avion, a-vi-on, avion”
L’acquisition de vocabulaire nécessite des capacités de discrimination phonémique efficaces.
Beaucoup des mots courants sont très proches (poule/boule, chat/ça…) et l’enfant doit pouvoir les discriminer de façon automatique. Quand on entend une histoire ou lors d’un échange à l’oral, les mots s’enchaînent rapidement.
Pour que la compréhension soit précise et efficace, l’enfant doit pouvoir traiter de façon rapide et automatique ces subtilités phonétiques de la langue et se concentrer sur le sens global de ce qui est dit ou raconté. Des activités pour entraîner ce traitement phonétique sont important pour tous, et encore plus nécessaires aux enfants qui n’ont pas le français comme langue maternelle.
Que faire concrètement en classe
Adapter notre façon de nous adresser à nos élèves
- Adapter le flux de parole: parler lentement, en articulant les phonèmes. Plus le thème qu’on va aborder est nouveau ou une histoire complexe, avec des mots que les élèves ne connaissent pas, plus il va être important de prendre le temps de bien expliciter ces mots, donner leur prononciation.
- Répéter les mots, en isolation si besoin. Cela peut être quand on travaille avec des cartes de vocabulaire: “oui, avion” au lieu de “oui, c’est un avion” (l’enfant entend “navion”). Mais aussi quand on lit une histoire:
Utiliser des gestes pour aider les élèves à distinguer certains sons
Certains phonèmes dans la langue française sont très proches. Des mots comme “main/nain”, “beau/dos” peuvent être difficiles à distinguer à l’oreille pour nos jeunes élèves. Pour d’autres mots, ce sont les graphèmes qui peuvent être difficiles à distinguer, les confusions “d” “b” sont courantes.
- Utiliser des signes pour indiquer le phonème peut être une aide précieuse, et surtout quand ils commencent à encoder ou à décoder. J’ai longtemps utilisé en maternelle les gestes de Borel-Maisony. A chaque phonème de la langue correspond un geste, quel que soit le graphème utilisé. Voici une très belle vidéo pour découvrir ces gestes.
Proposer des activités ciblées sur la structure phonétique
- Les comptines sont un excellent moyen de favoriser l’acquisition des sons. Dans “La classe de Luccia” on retrouve un recueil impressionnant et classés progressivement: Comptines pour jouer avec les syllabes et les phonèmes.
- Voici un jeu de cartes et un loto pour travailler l’acquisition sons consonnes à partir des “paires distinctives”, fabriqué à partir de l’excellent livre de Philippe Boisseau, Enseigner la langue orale en maternelle.
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